Karim : « Si j’avais à nouveau un garçon je ne le ferais pas circoncire »

Karim a été circoncis dans la tradition musulmane. Ayant réalisé les complications que cela lui a causé dans sa sexualité, il rejette aujourd’hui cette pratique ainsi que celle de l’excision, qui avaient pourtant cours dans sa famille jusqu’ici.

karim grande mosquee de paris

Karim a tenu à témoigner à visage découvert. La religion tient une place importante dans sa vie : le voici il y a quelques années dans l’enceinte de la grande mosquée de Paris.

Témoignage

Je suis né dans une famille lettrée musulmane. Tous les enfants de ma fratrie ont été scolarisés, mais mon père tradipraticien m’a choisi pour l’aider et lui servir de bâton de vieillesse et je ne suis pas allé à l’école. Ma mère est illettrée.

Je suis né le 29 août 1980 à Bouaké en Côte d’Ivoire, 8ème enfant d’une large fratrie. J’ai aussi 5 demi frères et sœurs d’une seconde épouse de mon père. Mon père était très diplomate et les deux femmes s’entendaient bien et vivaient dans la même maison à tel point que ma mère allaitera les enfants de la deuxième épouse pendant son absence quotidienne pour s’occuper de son commerce. Les liens sont forts entre les enfants de ma mère et ceux de ma belle mère. Les enfants de la deuxième épouse aiment et respectent beaucoup ma mère. De mon côté, j’aide la deuxième femme de mon père en lui envoyant chaque mois depuis la France les médicaments dont elle a besoin pour sa santé.

J’ai été circoncis à 8 jours à l’hôpital, peut-être avec anesthésie locale, je ne sais pas, et n’en ai jamais parlé avec mes parents. L’opération m’a enlevé le prépuce, le frein, et la cicatrice se trouve à environ 1 centimètre de la couronne du gland. Je n’ai aucune mobilité de la peau et ne peux pas la faire coulisser vers le gland.

J’ai eu des relations sexuelles avec une femme pour la première fois à 18 ans sans jamais avoir pratiqué la masturbation. J’ai vécu cette première relation sexuelle sans véritable plaisir.
Bien des années plus tard, en Mauritanie au cours de mon exil vers l’Espagne, je ne voulais pas avoir de relation avec une femme pour ne pas être entravé dans mes projets de trouver asile en Europe, et ce, pendant 3 ans. Des amis m’avaient préconisé de me masturber pour pallier ce manque de relation sexuelle. J’ai essayé et y suis parvenu avec beaucoup d’efforts en utilisant une crème hydratante. Cela m’a procuré plus de difficultés que de plaisir car j’ai besoin de beaucoup de temps pour pouvoir jouir et éjaculer et cela ne me donne pas envie de recommencer. Conclusion : je ne le fais jamais. De plus, en Afrique, si tu te masturbes ça signifie que tu n’es pas capable de trouver une femme. Il est fortement conseillé de ne pas se masturber pour ne pas détériorer le mariage et pour respecter sa femme, c’est à dire pouvoir lui consacrer toute ton attention.

Pendant les rapports sexuels avec les femmes, j’utilise du gel pour avoir un coulissement agréable.

Sur le tard, j’ai fini par prendre conscience que ces difficultés venaient de la circoncision. Si j’avais à nouveau un garçon je ne le ferais pas circoncire. La fille que j’attends avec ma compagne ne sera pas excisée pour les mêmes raisons, et sa mère qui est elle-même excisée est d’accord avec moi.

Karim

Notes de Droit au Corps :

  • Karim nous a communiqué un complément d’information. Marié dans sa jeunesse, il a eu 4 enfants : un garçon en 1996 qui a été circoncis puis trois filles en 1998, 2004 et 2008, qui ont été excisées selon la tradition et par sa propre mère.
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